📻 Si vous préférez écouter que lire, l’essentiel de cet article est repris dans une mini-série de podcasts : épisode 37 à 42.

En classe, dans un métro bondé, en plein repas de famille ou simplement chez soi, qui n’a jamais traversé ce sentiment de solitude si difficile à comprendre ?

En tant qu’hypersensible, cette sensation de décalage avec les autres vous est même sûrement familière.
Votre sensibilité, parfois incomprise par votre entourage, devient alors un obstacle impossible à franchir.
Résultat : vous vous éloignez peu à peu des autres pour échapper au rejet et aux stimuli constants du monde moderne. Vous profitez d’être seul pour vous ressourcer, accepter vos émotions et vos particularités. D’ailleurs, la solitude vous offre la paix, le calme et le silence tant recherchés de nos jours.

Alors, comment trouver l’équilibre entre une solitude choisie et non subie ? Peut-on être hypersensible solitaire et serein ? Je vous partage ma vision dans cet article.

Jeune fille à l'air triste, debout dans un métro bondé, tenant une peluche géante en forme de nounours contre elle

Mieux comprendre le sentiment de solitude

Encore aujourd’hui, la solitude et l’hypersensibilité sont des termes auxquels on associe spontanément une connotation négative.
Dans tous les domaines, on a besoin de normaliser les choses pour les mesurer.

Seul ou vulnérable : une question de point de vue

Les instituts de statistiques et les sociologues estiment nécessaire de fréquenter plusieurs réseaux de sociabilité : famille, amis, voisins, collègues, camarades de classe, personnes rencontrées en club, en association, etc.

Malheur à ceux qui ne fréquentent que les membres d’un seul de ces réseaux ! Ils sont immédiatement considérés comme « vulnérables ». Pour autant, on peut être sans réseau et ne pas se sentir seul. Mieux encore, on peut aimer être seul !

Que fait-on des situations de vie atypiques ?

Les personnes isolées, sans famille ou sans contact, pour diverses raisons ? Les personnes expatriées dans un pays dont elles ne parlent pas la langue ? Les personnes ayant un handicap mental, physique ou une maladie invalidante, qui leur empêche l’accès à une vie sociale ordinaire ?

Et que dire des personnes qui vivent seules dans la précarité, le dénuement ou qui n’ont pas de logement ?

Encore une fois, on voit bien que la norme régit tout. Elle s’efforce d’organiser et de cadrer une réalité bien trop complexe et diversifiée ; apposant des étiquettes qui enferment, voire stigmatisent.

Isolement relationnel : une expérience choisie

Une enquête de l’Insee [1], « Relations de la vie quotidienne et isolement », propose un indicateur pour mesurer « l’isolement relationnel ». Il s’agit du nombre de conversations personnelles, de plus de cinq minutes, qu’une personne a durant une semaine.

Une valeur inférieure à cinq conversations caractérise l’isolement relationnel.

Dans mon contexte habituel, je suis précisément dans cette situation de moins de cinq conversations par semaine. Et je ne pense pas être la seule personne hypersensible et introvertie qui travaille à domicile à vivre ça.

Pour autant, même si l’Insee me catalogue comme une « isolée relationnelle », je ne vis pas cette solitude comme une expérience négative.

Puisque chaque être humain est singulier, j’ai du mal à juger pertinente l’idée d’une quantité et d’une qualité déterminées que l’on devrait avoir en termes de relations interpersonnelles.

Je pense que certaines personnes souffrent beaucoup de la solitude en vivant avec un conjoint et au sein d’une famille avec lesquels elles sont malheureuses. Pour d’autres, à l’inverse, le silence et le retrait sont aussi indispensables que l’air pur et la lumière.

Et si la solitude était mesurée, non avec des chiffres déterminés de manière aléatoire, mais selon des critères de qualité de vie, de bien-être physique et mental ?

Et si la solitude n’était pas vue comme un état définitif, mais plutôt comme une expérience nécessaire, variant suivant les contextes et les périodes de la vie ? Une expérience de reconstruction parfois, de connaissance de soi à d’autres moments ?

[1] J.-L. Pan Ké Shon, « Vivre seul, sentiment de solitude et isolement relationnel », Insee première, n° 678, octobre 1999.

Femme joyeuse discutant au téléphone dans son salon

Sentiment de décalage : le point commun des minorités

Dernièrement, j’écoutais un podcast sur les thèmes de l’éco-anxiété et de la solastalgie.

Ces mots ont récemment été créés pour désigner un mélange d’anxiété, de tristesse, de colère et d’impuissance.

Ce cocktail émotionnel touche essentiellement des personnes préoccupées et impactées moralement par la dégradation de l’environnement. Elles se sentent en décalage face aux personnes de leur entourage qui ne sont pas concernés comme elles le sont.

Elles aussi expérimentent un fort sentiment de solitude, tout comme celles et ceux qui font partie d’une quelconque minorité.

Vous savez, j’ai toujours éprouvé un mélange d’admiration et d’empathie pour les personnes qui revendiquent de vivre la vie, la sexualité ou le genre qu’elles ont choisi. Elles réclament la même considération et les mêmes droits que la majorité, malgré la singularité qui est la leur. Elles veulent simplement exister telles qu’elles sont ou telles qu’elles ont choisi d’être.

Et ce n’est que justice à mon avis.

Si j’ai de l’empathie pour ces personnes c’est parce que je suis consciente moi aussi de faire partie d’une (ou plusieurs) minorité(s) ressentant un fort décalage avec les autres.

D’abord, à cause de mon enfance et mon adolescence atypiques.

Ensuite, à cause de mes convictions liées à la protection de l’environnement (à une époque où ce n’était pas vraiment un sujet d’actualité).

Plus tard, quand j’ai pris conscience de mon hypersensibilité…

Et enfin, quand je suis devenue végétarienne il y a quelques années…  

Peut-être que vous aussi, vous vous sentez en décalage ou différent des autres ?                                                     

Quand on fait partie d’une minorité, on se sent isolé face à la masse des personnes qui n’ont pas ce qu’elles jugent comme des spécificités étranges, incompréhensibles ou pire, des tares.

Main d'une personne déposant des origamis en forme de coeurs, aux couleurs du mouvement LGBT, sur un fond de papier turquoise.

Choisir la solitude : les 4 arguments des hypersensibles

Argument n°1 : se sentir incompris

Comprendre un hypersensible ou vivre avec un hypersensible est une bien jolie mission. Quand nous essayons d’expliquer notre tempérament à quelqu’un, il arrive que la validité de notre expérience sensible soit prise à la légère.

L’un de mes plus grands moments de solitude fut lorsqu’un de mes proches m’a dit : « Je ne te comprends pas. Tu es trop compliquée ».

Quand j’ai entendu ces mots, je suis d’abord restée un peu estomaquée. Puis j’ai souffert de ce que j’ai vécu comme un rejet de ma personne. Pour diverses raisons, cette personne était la dernière que j’aurais imaginé ne pas me comprendre…

Vivre cela peut nous donner envie de nous éloigner des autres. Et c’est exactement la réaction que j’ai eu. Je n’avais qu’une envie : rester seule. Longtemps. À ce moment-là, je me sentais mieux seule qu’incomprise.

Je suis quelqu’un de naturellement solitaire et je suis capable de faire la plupart des choses seule et avec plaisir. Mais je n’ai jamais souffert aussi intensément de la solitude qu’au milieu de la foule, lors d’un concert, par exemple. Je crois que c’est directement lié à notre besoin naturel de partager et de connecter, lors des moments qui sont puissants et importants pour nous.

L’incompréhension systématique de notre tempérament est parfois vécue comme une forme d’adversité. Il est alors naturel de se renfermer peu à peu. On devient de plus en plus solitaire. D’autant plus, si l’attrait pour la solitude est déjà un trait de tempérament que l’on possède.

Femme fronçant les sourcils et ouvrant les mains tendues devant elle car elle se sent incomprise

Argument n°2 : se ressourcer

Nous vivons dans une société où le chaos est globalement bien accepté. Nous sommes constamment entourés de bruits et de stimuli puissants.
Mais trop de stimuli en même temps, de lumières fortes et de bruits, perturbent notre équilibre et peut nous rendre malade. Je vous en parle d’ailleurs dans mon
podcast.

L’inconfort en situation sociale est presque toujours causé par l’hyperstimulation de nos sens… ou l’appréhension de celle-ci.

C’est pourquoi nous avons régulièrement besoin de solitude et d’éviter la foule pour préserver notre système nerveux, ainsi que notre santé.

Ce phénomène touche aussi bien les extravertis que les introvertis.

Mais ces derniers, se déchargent encore davantage de leur énergie au milieu du monde. Ils ont davantage besoin de se ressourcer en solitaire. Ils apprécient alors tout particulièrement de se réfugier dans le cocon douillet et calme de leur chez-soi, qui est très important pour eux.

Foule dense et agitée à l'intérieur d'un bâtiment

Argument n°3 : Craindre le jugement

Si vous souffrez d’anxiété sociale, de peur du regard des autres, votre système nerveux ultra-sensible ne peut que renforcer cette peur.

Selon moi, l’anxiété sociale n’est pas une maladie comme le milieu médical nous porte à le croire. Mon hypothèse est que cette anxiété est liée au fait que nous sommes habitués à observer et décortiquer les moindres signaux. Une mauvaise interprétation de ces comportements non verbaux liée à une faible estime de soi fait le reste. Ce n’est donc pas irrémédiable. Même si un complet apaisement demande du temps et de la persévérance.

Il existe néanmoins des moyens simples pour apaiser cette peur en contexte social. J’en révèle quelques-uns dans mon ebook Sérénité en société, le mini guide des bonnes pratiques et je donne des clés pour développer son estime de soi et apaiser sa peur des autres dans la formation du même nom.

Jeune femme qui souffre de la moquerie de ses collègues de travail

Argument n°4 : Avoir peur de l’abandon

Comment oser être soi quand la peur du rejet ou de l’abandon prend toute la place ? Pour peu que l’on ait vécu de graves blessures pas tout à fait cicatrisées…

Comment s’affirmer quand le désir de faire plaisir aux autres ou la peur de sa propre réaction, fait fuir le conflit jusqu’à oublier ses propres besoins ? Quand la moindre critique nous blesse comme si elle remettait en question tout ce que nous sommes ?

Comment construire sa vie, prendre des décisions importantes pour soi, lorsque la dépendance affective nous fait voir la solitude comme une vulnérabilité ?

Dans un environnement qui prône peu la sensibilité comme une valeur phare, on a du mal

à vivre notre différence. Il est logique d’avoir peur d’être « mal vu », mal considéré, mal accepté. Cette peur provient de multiples causes. Mais peut vraiment être équilibrée grâce à un travail personnel sur l’estime de soi. Sans cela, on utilise des stratégies souvent néfastes pour notre bien-être.

Jeune fille accoudée sur une table, se cachant le visage dans les bras et brandissant un coeur en papier brisé en deux

Se cacher : une mauvaise stratégie

En tant qu’hypersensibles, nous sommes très conscients de notre différence en termes de besoins et de priorités. Mais souvent, nous ne pouvons pas ou ne voulons pas respecter ces besoins et organiser notre vie par rapport à eux. 

Justement parce que nous en avons assez de paraître si différents ! Nous voudrions juste être comme tout le monde et ne plus avoir tant d’efforts à faire pour être compris.

Alors certains d’entre nous vivent dans la solitude ou choisissent de porter un masque, une persona, afin de se protéger en contexte social et se fondre dans la masse. Ce stratagème permet de faire porter le poids du regard des autres sur un personnage et non sur notre moi profond.

Il peut être utile dans certains cas très spécifiques :

👉 Lorsque l’on souffre d’anxiété sociale et qu’on doit se retrouver dans un contexte que l’on ne peut éviter, au milieu de beaucoup de monde.

👉 Lorsque l’on veut se forger une nouvelle attitude pour développer nos compétences émotionnelles. J’explique cet aspect dans l’article « Comment augmenter sa confiance en soi et son niveau d’énergie », dans les deux derniers paragraphes sur la posture de puissance.

👉  Pour les besoins de notre activité professionnelle, de nos loisirs ou de nos activités quotidiennes, lorsque nous ne souhaitons pas créer de liens durables avec les personnes.

En dehors de ces contextes précis, j’aurai plutôt tendance à déconseiller ce stratagème.

D’abord, porter un masque, c’est aller à l’encontre des valeurs que, je crois, nous portons toutes et tous : intégrité, sincérité et authenticité.

Si je fais une analogie avec le blogging, j’ai vraiment constaté qu’il est important de se

montrer tel que l’on est. Car on attire naturellement des gens qui ont des valeurs similaires aux nôtres. Les relations s’en trouvent simplifiées.

Quel genre de relation allons-nous créer si nous jouons un personnage ? À mon avis : une relation faussée, qui ne partira pas sur des bases saine.

Et quelle pourra être la réaction de nos interlocuteurs le jour où, fatalement, ils s’apercevront

que nous ne sommes pas la personne que nous avons fait semblant d’être, mais seulement une façade ?

Je pense que l’authenticité est importante et qu’elle a plus de bienfaits que de méfaits.

Le premier bénéfice étant de porter fièrement qui nous sommes et non de nous cacher comme si nous étions coupables de quoi que ce soit. Se sur-adapter à notre environnement est néfaste pour l’estime de soi et pour notre santé en général, car cela nous empêche d’être nous-mêmes et génère de l’hyperstimulation à outrance.

Rappelez-vous que ce n’est pas un signe de bonne santé mentale que d’être bien adapté dans une société malade 😉.